Il fait partie de l’un des farouches opposants au régime actuel à appeler à la fin du bras de fer post-électoral et à l’acceptation du verdict des urnes. Une position mal vue en son temps mais qui a fini par faire l’unanimité. Interrogé hier mardi 26 avril, l’ancien ministre et Président du Parti du réveil des démocrates (Prd-Nouvelle génération) Kamarou Fassassi, est resté fidèle à sa logique de départ. Pour lui, le seul choix qu’il a fallu faire pour épargner au pays des situations difficiles est celui de la paix.
Le Matinal : Monsieur le Ministre, hier vous étiez un opposant farouche au régime Yayi, mais contre toute attente, vous avez invité le peuple à accepter le verdict du scrutin présidentiel pendant que vos pairs refusent de considérer les résultats. Qu’est- ce qui justifie cette position ?
Kamarou Fassassi : Je ne sais pas ceux que vous appelez mes pairs, mais si vous faites allusion à ma déclaration immédiatement après les résultats donnés par la Cour constitutionnelle, je crois que j’ai agi selon ma conscience. J’étais en phase, que dis-je, en face d’une situation inédite. Le Bénin risquait de s’embraser et j’ai voulu apaiser les esprits. J’ai voulu calmer tout le monde et dire que qu’on soit content ou pas, nous n’avons pas d’autres recours que l’aventure et je crois que c’est raisonnable pour tout patriote, le reste vient après. Il faut la paix. Quand on a la paix et la démocratie apaisée, si vous voulez, vous serez avec le président Yayi Boni, si vous voulez, vous serez contre sa politique pourvu que tout se passe dans la paix. Je crois que tout le monde est d‘accord avec moi et surtout quand on voit ce qui s’est passé dans la sous-région, c’est une bonne position en tout cas, c’est la mienne.
D’aucuns considèrent cela comme une trahison des partisans de l’Union fait la Nation (Un) et de l’Alliance Abt. Qu’en dites-vous ?
Non, pas de trahison de l’Un. Je ne crois pas, puisque je n’étais pas Union fait la Nation. J’ai soutenu la candidature du Président Abdoulaye Bio Tchané et croyez moi, en tout cas en ma connaissance, par rapport aux législatives, il n’a pas une liste en tout cas, et il ne m’en a jamais parlé. Moi-même, je n’avais pas de liste avant et j’ai fait avec mes amis politiques le choix de la paix. C’est vrai, ce n’était pas évident mais qu’est ce que vous voulez que j’aille dire aux populations après avoir demandé la paix ? Vous voulez que j’aille dire non il faut aller contre le président Yayi pour lui barrer la route ? Non, moi je n’ai pas pensé à ça. Croyez-moi je suis avant tout pour la paix. On peut être pour ou contre Yayi. Mais que cela se passe dans la paix et que le jeu démocratique se déroule normalement.
Beaucoup de scandales étaient agités peu avant la campagne électorale et ont éclaboussé plusieurs hommes politiques. Pour ce qui vous concerne malgré votre explication, ne croyez-vous pas que certains peuvent penser que votre position actuelle est une façon de sortir votre épingle du jeu ?
Chacun pensera ce qu’il veut. Je ne crois pas que j’ai des épingles dans le jeu. Si vous voulez parler de l’affaire dite de la Sbee, je me suis bien expliqué. Je crois l’avoir longuement expliqué et je ne veux pas revenir là-dessus. Nous sommes dans une démocratie. Je la veux apaisée. Je suis un homme qui pense au bonheur de ce peuple. Nous sommes des hommes politiques. Travaillons pour le bien du peuple surtout le bien de la jeunesse. Et pourquoi personne ne me juge par rapport au travail qui a été fait ? J’ai été ministre des travaux publics. J’ai désenclavé, j’aime bien le dire, plusieurs régions de notre pays. J’ai été ministre des Mines, de l’énergie et de l’hydraulique, rappelez-vous. A part ça, je vous dirai que tout le reste n’est que du bavardage.
Le ministre Kamarou Fassassi n’est pas candidat aux élections législatives de 2011 et plus étonnant, il invite les militants de son parti (Prd Nouvelle génération) à voter pour la liste Fcbe. N’est-ce pas un gros risque de sacrifier son propre parti au profit des intérêts inavoués ?
Je ne sais pas ce que vous appelez intérêts inavoués. Je vous répète que j’avais le choix. Je ne peux pas croiser les bras. Mes amis non plus. On s’est réuni. On a pesé le pour et le contre par rapport à chaque liste en présence et on a tenu compte de la situation qui prévaut aujourd’hui. Nous avons demandé que l’on vote pour les candidats des Fcbe, puisque le Chef de l’Etat a dit qu’il lui faut la majorité pour procéder à sa Refondation. Je veux bien qu’on lui donne cette chance. C’est fini les procès d’intention, il ne fera pas mon parti, et autres. Vous pouvez être certain que nous voulons la paix et qu’il y a eu trop de retard. Croyez-moi, quelques fois, c’est la politique politicienne qui a prévalu. En 2006 j’avais appelé à voter Yayi. Ca s’est retourné contre moi. Peut-être que cette fois-ci, en appelant à voter pour lui, on ne sait pas peut être que ça ira pour tout le monde.
Croyez-vous vraiment au Ko réalisé par le Chef de l’Etat ?
Dans ma déclaration, j’ai dit ce que je pensais. Mais je ne veux plus revenir là-dessus. Croyez-moi. Mais nous devons reconnaître, je suis désolé de le dire. C’est pour ça que quand on parle de Yayi Boni, des résultats, je parle autrement ; non pas parce qu’il partira dans cinq ans et qu’au bout de cinq ans, il aura des avantages. Non je ne veux pas revenir sur le passé. Il nous a battus à plate couture. Ça, il faut le reconnaître. Tout le monde a essayé de frauder un peu. Ils ont peut être trouvé le bon schéma, mais toujours est-il qu’il a fait une meilleure campagne que nous. Il connaît finalement mieux les Béninois que nous. Il sait que les Béninois ont des problèmes. Il a apparemment dépensé beaucoup plus que nous et il a peut être les gens qui sont rôdés pour augmenter les voix. Je ne veux plus revenir là-dessus. Comme l’a dit un grand homme politique « Pour l’avenir, que la lutte soit plus consensuelle, catholique et que les discussions soient beaucoup plus consensuelles et beaucoup plus nettes ».
L’autre défi que le Président Yayi Boni s’est assigné est la Refondation qu’il entend engager au cours de son second mandat. Ne craignez vous pas une révision intéressée de la constitution pour se maintenir au pouvoir ?
Je ne crains rien premièrement, parce que devant le monde entier, il l’a dit alors que personne ne l’obligeait à le faire, que c’était son dernier mandat. S’il y a seulement deux mois, vous allez vous dire que c’est faux, attendons de voir et peut-être que si on l’aide, il ne reviendra pas la dessus et je n’ai pas de raison de croire qu’il reviendra là-dessus. Non, disons qu’il veut faire une refondation. Je pense qu’il a 5 ans d’expérience présidentielle maintenant. Je crois qu’il a forcément acquis des expériences et qu’il n’y a pas de raison qu’il ne pense pas mieux refonder, tout revoir et permettre une avancée. Je crois que c’est possible. Je lui fais confiance et c’est d’ailleurs pour vous dire que c’est un mot que nous aimons tous au Prd Nouvelle génération. Notre congrès qui n’a malheureusement pas pu avoir lieu et qui aura lieu bientôt se penchera sur la question. Je pense que c’est bien de lui faire confiance.
Qu’entendez-vous du Forum dit de vérité et de sursaut patriotique que compte organiser le médiateur de la République ?
J’ai eu l’occasion d’entendre le professeur Tévoédjrè parler de ce forum. J’ai donné tout de suite mon accord. C’est un homme d’ouverture. Il a commencé à m’associer. J’ai accepté et je fais partie de l’organisation de ce forum. Il faut que chaque Béninois et chaque Béninoise vienne dire, par des personnes invitées et interposées, les choses. Ce que je pense de notre expérience, c’est qu’il y a eu de très bonnes choses et il faut le dire. Mais il y a des choses qui sont moins bonnes et qu’il faudrait qu’on corrige. Je souhaite que tout se passe dans la paix, dans la cohésion et l’unité nationale. Je crois qu’on invitera beaucoup de monde. Le souhait est que tout le monde arrive et qu’on puisse dans l’amitié dire ce qui a été bon et ce qui ne l’a pas été. Ce ne sont pas que les autres qui font mal. Nous aussi on a peut-être commis des erreurs. Le Chef de l’état a demandé pardon pendant la campagne. Nous aussi quelque part, nous avons des pardons à demander. Pour ce qui me concerne, pour ceux que j’ai malmenés, je demande pardon à mon tour.
Transcription Hospice Alladayè